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Histoire: | La création d'une juridiction pénale spéciale pour les mineurs avait été envisagée par le législateur vaudois dès la 1e moitié du 19e siècle. Plusieurs projets de lois furent discutés, mais n'aboutirent pas. Lors des travaux du nouveau Code pénal vaudois, adopté le 17 novembre 1931, la question fut à nouveau débattue, mais n'aboutit qu'au vote de la loi du 9 mai 1932 organisant le régime provisoire applicable aux délinquants mineurs (entrée en vigueur le 1er juillet 1932). Selon celle-ci, qui laissait pour l'essentiel subsister le droit ancien, un enfant de moins de 8 ans révolus ne pouvait pas faire l'objet d'une poursuite pénale. Entre 8 et 15 ans révolus, s'il était inculpé d'un délit, sa culpabilité était jugée par le Tribunal d'accusation, sur la seule base du dossier, sans qu'il soit vu ni entendu, sans débat contradictoire et sans possibilité de recours. S'il était reconnu coupable, il était alors renvoyé au Conseil d'Etat, qui prononçait l'une des mesures suivantes : la remiseaux parents; l'admonestation; les arrêts de police pour 15 jours au maximum; le placement dans une famille; le placement dans une maison d'éducation; le placement dans un asile ou dans un établissement hospitalier; l'internement dans une école de réforme (art. 103 du Code pénal). Dans le cas d'un adolescent (soit un mineur âgé de 15 à 18 ans révolus), ce sont les tribunaux ordinaires qui décidaient de la culpabilité, selon les règles normales de la procédure pénale. Le coupable était également renvoyé au Conseil d'Etat, qui pouvait prononçer les mêmes mesures qu'à l'égard d'un enfant ou la détention jusqu'à cinq ans dans un établissement destiné aux jeunes délinquants. Cependant, en cas de délit grave ou lorsque l'adolescent apparaissait "gravement perverti", le tribunal pouvait directement prononcer une peine, comme à l'égard d'un adulte, quitte à l'adoucir en raison de son jeune âge.
Ce système fut complété par la loi du 29 août 1934 organisant un Secrétariat pour la protection desmineurs au Département de justice et police. Ce Secrétariat, rattaché au Service de police et pénitentiaire, devait être tenu informé de toute enquête pénale instruite contre un mineur de moins de 18 ans. Si celui-ci était renvoyé au Conseil d'Etat, le Secrétariat effectuait une enquête sur le mineur, sa santé, son caractère, sa moralité, son travail scolaire ou professionnel, ses habitudes, ses fréquentations, les conditions du milieu dans lequel il vivait et les aptitudes de ses parents à assurer son éducation. Une fois la mesure prononcée par le Conseil d'Etat, le Secrétariat surveillait son exécution, notamment en assurant l'exécution des arrêts de police, en plaçant le mineur dans une famille, en supervisant son internement ou sa détention, en proposant éventuellement la modification ou la suspension de la mesure, en fonction de l'évolution du mineur. Enfin, le Secrétariat pour la protection des mineurs avait pour tâche de conseiller les autorités etles parents ou tuteurs qui leconsultaient, sur les mesures paraissant indiquées dans chaque cas particulier.
Le Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (entré en vigueur le 1er janvier 1942), institua enfin un régime moderne de traitement des jeunes délinquants. Tous les cantons - sauf le Valais - créèrent alors une juridiction chargée de l'application des dispositions du nouveau Code concernant les mineurs. Il s'agissait en effet de confier cette tâche à des juges spécialisés, qui aient pour premier souci l'intérêt éducatif des enfants et adolescents qui leur seraient déférés.
La loi du 3 décembre 1940 sur la juridiction pénale des mineurs, entrée en vigueur le 1er janvier 1942 et basée principalement sur un modèle genevois, créa donc la Chambre pénale des mineurs, juridiction spécialisée et centralisée qui soustrayait entièrement les mineurs à la procédure pénale ordinaire. Cette nouvelle instance était formée d'un président et d'un vice-président juristes, ainsi que de quatre juges, dont une femme, et decinqsuppléants, dont une femme (art. 1). Elle assurait l'instruction de la cause (menée par le président ou un juge délégué) et le jugement de celle-ci (elle siégeait alors à trois : le président et deux juges), en tenant compte en premier lieu de "l'intérêt éducatif du mineur" (art. 14). Elle pouvait prononcer les mesures prévues par le Code pénal suisse, notamment : la réprimande, les arrêts scolaires, la surveillance de l'éducation du mineur laissé dans sa propre famille, la mise en observation, la remise à une famille digne de confiance, le placement dans un établissement d'éducation, l'institution d'un traitement spécial, l'amende et sa conversion éventuelle en prestation de travail ou d'arrêts, la détention d'un jour à un an (art. 31 et 47). Il est à noter que ces mesures s'appliquaient désormais aux enfants de 6 à 14 ans révolus et aux adolescents de 14 à 18 ans révolus.
La Chambre pénale des mineurs disposait en outre d'un droit de regard sur l'exécution des sentences, confiéeau nouvel Office cantonal des mineurs, successeur du Secrétariat pour la protection des mineurs et rattaché au Département de justice et police, Service de la protection pénale. Cet Office avait également des fonctions de prévention, de conseil et de coordination des mesures publiques et privées en faveur des mineurs (voir l'arrêté du 23 décembre 1941 sur l'Office cantonal des mineurs). Son action l'amenait à collaborer étroitement avec le nouvel Office médico-pédagogique, créé en 1942 et dépendant également du Service de la protection pénale.
En 1957 fut créé un Service de l'enfance, rattaché au Département de l'intérieur et qui hérita notamment des compétences de l'Office cantonal des mineurs. L'Office médico-pédagogique et la Maison d'éducation de Vennes lui furent rattachés. A cette occasion fut adoptée la loi du 5 septembre 1956 sur la juridiction pénale des mineurs (entrée en vigueur le 1er janvier 1957), qui regroupa et réorganisa l'ensembledes dispositions légales et réglementaires relatives à ce sujet, sans introduire cependant de modification essentielle quant au fond. Afin de "dépénaliser" davantage le droit des mineurs et d'accentuer son caractère éducatif, la Chambre fut rebaptisée Chambre des mineurs.
Pour faire face à l'augmentation constante des causes à traiter, l'effectif de la Chambre des mineurs fut augmenté par la loi du 8 mai 1967 (un président, deux vice-présidents, six juges dont une femme au moins et sept suppléants dont une femme au moins), puis par celle du 19 septembre 1972 (adjonction d'un deuxième président).
Le Code pénal suisse fut modifié le 18 mars 1971 (entrée en vigueur au 1er janvier 1974), notamment au chapitre des dispositions concernant les mineurs. L'âge des enfants justiciables fut porté à 7 ans-15 ans révolus et celui des adolescents à 15 ans-18 ans révolus. Différentes autres modifications du droit des mineurs furent introduites, généralement dans le sens d'une meilleure adaptation des mesures à chaque cas particulier. Au niveau vaudois, une loi du 26 novembre 1973 sur la juridiction pénale des mineurs (entrée en vigueur le 1er janvier 1974) fut adoptée, afin de tenir compte des nouvelles dispositions du droit fédéral et de diverses modifications légales et administratives cantonales intervenues depuis 1957. La Chambre des mineurs devint le Tribunal des mineurs. L'organisation et la procédure ne subirent cependant pas de modifications essentielles. Le principe selon lequel le président du Tribunal était l'autorité d'exécution fut affirmé (art. 70; auparavant, cette responsabilité incombait, selon les cas, au président ou au Service de l'enfance). Le président pouvait cependant déléguer le patronage, l'assistance éducative ou toute autre mesure au nouveau Service de protection de la jeunesse (créé le 1er avril 1970, en remplacement de l'ancien Service de l'enfance, et rattaché au nouveau Département de la prévoyance sociale et des assurances), ou à un autre organe officiel spécialisé, organisation privée ou personne qualifiée (art. 73). Il devait charger le Service de protection de la jeunesse d'exécuter les jugements et décisions ordonnant la détention, le placement familial, le placement en maison d'éducation ou un traitement spécial (art. 75). Dans tous les cas, il disposait d'un droit de contrôle (art. 86). Le Tribunal des mineurs régla son organisation interne et son fonctionnement par un règlement du 10 décembre 1973. Celui-ci fut abrogé par celui du 11 juillet 2001. |
Organisation interne: | Rattachement administratif: Ordre judiciaire |
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