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Histoire: | Histoire du producteur: La Maison des Artistes a été fondée en 1922 par Hélène de Mandrot, alors usufruitière du Château de La Sarraz, que son mari, Henri de Mandrot, avait légué au " Musée Romand " qu'il avait créé de son vivant. Hélène de Mandrot, grande promotrice des arts, des avant-gardes et des formes d'expressions contemporaines, décida de faire du Château de La Sarraz un foyer d'accueil vivant et artistique, à ces fins, elle réunit, à partir de l'été 1922, un premier groupe d'artistes pour des " Vacances d'artistes ", dans le but de créer une émulation entre de jeunes artistes (peintres, sculpteurs, architectes, écrivains) ayant besoin d'être soutenus et encouragés. Très vite, des artistes internationaux se joignirent aux artistes suisses lors des séjours organisés à La Sarraz, et des groupes d'habitués se formèrent, qui revinrent à diverses reprises, créant des liens entre eux. Les hôtes de la Maison des Artistes ne furent donc pas toujours des " jeunes " artistes novices. Cependant, le nombre de créateurs ayant bénéficié de l'accueil d'Hélène de Mandrot fut très important. La Maison des Artistes prit un virage en 1928, lorsqu'elle accueillit (et, bien plus que cela, participa de manière conséquente à son organisation) le premier Congrès International d'Architecture Moderne (CIAM). Lors de cette réunion, dont le programme avait été concocté principalement par Le Corbusier, les architectes présents signèrent une " Déclaration de La Sarraz " qui posa les bases et les postulats de l'architecture moderne. Suite à ce premier congrès, Hélène de Mandrot aspira à continuer sur cette voie et à faire de La Sarraz et de la Maison des Artistes un centre reconnu et prêt à réunir des manifestations de telle envergure. C'est ainsi qu'en 1929, un Congrès International de Cinéma Indépendant (CICI) eut lieu dans l'enceinte du Château, à l'instigation de Robert Aron, ami d'Hélène de Mandrot. Lors de cet événement, outre les nombreuses discussions et réflexions portées sur le statut du cinéma indépendant, Sergueï Eisenstein (certainement le plus célèbre de ces participants) dirigea un film, connu sous le nom de " Tempête sur La Sarraz ". Ce film allégorique, qui met en scène des congressistes déguisés, représente la lutte chevaleresque du cinéma indépendant contre l'esprit du cinéma commercial. Le film ne fut jamais retrouvé, son existence a cependant été attestée. Suite à ces deux congrès prestigieux, qui valurent à La Sarraz une réputation de " cellule rouge ", et la suspicion à la fois des autorités et d'une partie de la population, la Maison des Artistes se fit le siège d'encore quelques manifestations et congrès d'allure plus modeste. En 1930, une réunion intitulée " Présent et Avenir de La Sarraz " ambitionna de définir le rôle et les actions futures de l'organisation. En 1931, un Congrès du Musée Contemporain (CMC) prit ses quartiers au Château de La Sarraz, mais le projet avorta. En 1936, faisant échos au Congrès International d'Architecture Moderne, eut lieu le Congrès International pour la Réalisation des Problèmes Architecturaux Contemporains (CIPRAC), et en 1943, l'étonnant Congrès des Ondes Souterraines (COS). Enfin, en 1947, un Congrès International de géographie se réunit dans l'enceinte du Château. Parallèlement à l'organisation de ces différents congrès, la Maison des Artistes continua à accueillir de nombreux artistes pour des séjours estivaux, et se doubla, dès 1937, d'une Maison du Savant (direction confirmée par la teneur des deux derniers congrès mentionnés ci-dessus). Le nombre exact d'artistes ayant passé par La Sarraz n'est pas connu de manière certaine, la source principale étant les 5 Livres d'Hôtes, signés par les visiteurs (signatures parfois difficiles à identifier). Pendant et après la guerre, Hélène de Mandrot ouvrit aussi le Château à des blessés, notamment finlandais et français, ainsi qu'à des soldats.
La particularité au niveau archivistique de cette première période de la Maison des Artistes (c'est-à-dire du temps d'Hélène de Mandrot) est que les documents relatifs aux différents événements et invités, sont souvent éparpillés dans de nombreux fonds, et que le fonds à proprement parler de la Maison des Artistes est donc fortement lacunaire de ce point de vue. Il est aussi étonnant de trouver de la documentation sur des événements que l'on pourrait qualifier de " mineurs " (comme par exemple le Congrès sur les ondes souterraines de 1943, au rayonnement limité, et dont on trouve le programme, le rapport et des éléments de correspondance, ou des pièces concernant le XIVème Congrès International d'Histoire de l'Art (1936) qui ne fit qu'une halte à La Sarraz), alors qu'il ne reste rien, ou presque, des documents concernant le CIAM (hormis quelques documents concernant des CIAM postérieurs, mais aucun sur le premier) ou le CICI. Le chercheur pourra donc se trouver déçu, et confronté aux lacunes du fonds. L'inventaire permet aussi, dans le cas présent, de montrer ce qu'il n'y a PAS dans le fonds.
Cependant, en consultant les dossiers de préparation aux publications réunis par Jean-Marie Pilet, on trouvera un nombre important d'informations concernant cette période malheureusement peu documentée dans le présent fonds.
Après le décès d'Hélène de Mandrot, survenu le 26 décembre 1948 (dans sa maison L'Artaude, au Pradet, conçue par Le Corbusier), la Maison des Artistes, tout en perdant sa vocation première de foyer artistique vivant, connut un second souffle, et se consacra essentiellement à l'organisation de manifestations culturelles, principalement des expositions. Une exception à la règle, en 1953, la Maison des Artistes passa commande d'une oeuvre musicale à Raffaele d'Alessandro qui composa à cette occasion un quatuor à corde inédit, créé au Château de La Sarraz. C'est aussi la Maison des Artistes qui organisa, en 1954, la première exposition en Suisse romande de Paul Klee. Dès 1960, un " Prix du Château de La Sarraz " fut instauré. Différentes éditions se succédèrent et récompensèrent de jeunes artistes, peintres, sculpteurs, cartonniers lissiers ou céramistes, lors d'expositions réunies à cet effet. Les expositions de jeunes artistes alternèrent avec des expositions de peintres plus classiques et plus connus du grand public, comme Maurice Barraud ou Charles Gleyre. Dans les années 1980, le mouvement périclita et les expositions se firent plus rares. En 1998, pour le cinquantenaire de sa mort, une exposition fut consacrée à Hélène de Mandrot et la Maison des Artistes de son vivant.
Les rapports entre le Musée Romand et la Maison des Artistes ne furent jamais très clairs, mais, si les deux parties étaient indépendantes à la base, la Maison des Artistes fut rattachée au Musée Romand déjà du temps d'Hélène de Mandrot. Elle est aujourd'hui une section du Musée Romand et des expositions et des concerts sont encore présentés sous son égide.
La Maison des Artistes reste cependant intensément liée à la personnalité de sa fondatrice, Hélène de Mandrot; c'est pourquoi il est souvent difficile de séparer la vie privée d'Hélène de Mandrot de l'institution qu'elle a créée, puisqu'elle y invita ses amis, qui voyageaient avec elle, lui construisaient des maisons, la visitaient à Paris ou au Pradet. Il semble nécessaire de dresser ici une très brève biographie de la châtelaine pour mieux saisir le personnage et le côté exceptionnel de ce qu'elle a réalisé dans le contexte qui était le sien.
Biographie d'Hélène de Mandrot : Hélène de Mandrot, fille d'Aloys Revilliod, est née en 1867 à Genève. Elle descend d'une famille très aisée qui manifeste un intérêt pour l'art. Son grand-oncle, Gustave Revilliod, grand collectionneur, fonda le Musée Ariana (collection de céramique) à Genève. Hélène de Mandrot se forme dans les arts décoratifs, notamment à l'Ecole des arts industriels de Genève, et à l'Académie Julian de Paris. On sait aussi qu'elle eut des contacts avec Auguste Rodin . En 1906, elle épouse Henri de Mandrot et, en 1911, elle fonde une école de broderie à La Sarraz, et participera avec elle à des expositions (aménagements intérieurs, art appliqué, etc.). Après le décès de son mari (en 1921), la carrière artistique d'Hélène de Mandrot semble s'atténuer et son rôle de mécène s'accentuer, notamment avec la création de La Maison des Artistes en 1922. Dès lors son parcours se confond quelque peu avec cette institution. Hélène de Mandrot sera une grande voyageuse, partant à la découverte de nouvelles formes d'expression, organisant des voyages culturels thématiques (par exemple architecturaux), en Allemagne, Finlande ou autre, auxquels elle convie des artistes, hôtes de la Maison des Artistes. Héritière, par Henri de Mandrot, d'un ranch au Texas, elle réalisera plusieurs voyages aux Etats-Unis, où elle rejoindra notamment des architectes du Bauhaus exilés (comme Walter Gropius). Elle se fait aussi collectionneuse, mais non systématique. Elle commande, par exemple, des oeuvres architecturales : la maison du Pradet à Le Corbusier, mais aussi l'intérieur de son appartement à Chareau, à Paris, et une maison selon les normes du Congrès des ondes souterraines à Alfred Roth, à Zurich. Elle commande aussi des sculptures qu'elle installe dans son jardin au Pradet, devenu " Jardin de sculptures ", où se côtoient des oeuvres de Lipitchz et Rabinovitch. Ces oeuvres seront, peu avant sa mort, léguées au Kunsthaus de Zurich.
La personnalité d'Hélène de Mandrot reste difficile à saisir tant elle est riche et entourée de zones d'ombre. |
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